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Écoute de soi et de l’autre: comment développer son autonomie au travail ?

Focus sur deux dimensions clés de l’évaluation de l’Impact Relationnel (IR) pour mieux développer son autonomie au travail. 

Avant de construire des relations durables et positives, il faut d’abord savoir écouter et identifier ses propres besoins. En effet, cela permet de mieux écouter et comprendre les besoins des autres. 

Mieux s’écouter et écouter est rendu possible par une vision évolutive de soi-même. Une évolution que l’on exerce au travers de la recherche d’autonomie. 

Développer son autonomie au travail ou dans la vie privée, consiste à réaliser un passage de l’état d’enfant à l’état d’adulte. Un passage que très peu d’entre nous effectueront au cours de leur vie professionnelle et personnelle.

Développer son autonomie au travail, est-ce devenir adulte ?

Le passage psychologique de l’état d’enfant dépendant à celui d’adulte autonome est réalisé à travers un processus évolutif. Nous vivons ce processus de manière répétée tout au long de notre existence. Nous serons amenés à le revivre régulièrement lors de la construction de relations avec des individus, des équipes ou des organisations. Notamment dans notre rapport à ce que nous considérons être une autorité légitime ou non.

Dans les années 1970, Katherine SYMOR, a modélisé un « cycle de la dépendance ».  Dessiné par une analyste transactionnelle, il permet de suivre le développement de l’autonomie. Il existe 4 phases dans ce processus :

  • la dépendance, 
  • la contre-dépendance, 
  • l’indépendance, 
  • l’interdépendance.

La description de ces 4 stades de développement de l’autonomie peut permettre de comprendre des schémas inconscients. Elle permet aussi de prendre conscience des motivations qui sont sous-jacentes à nos désirs et à nos besoins profonds. Parallèlement, la prise de conscience de zones de vulnérabilité, et des émotions qui y sont associées, permet d’améliorer la qualité de l’introspection. 

Cela ouvre une réflexion avec notre conscience pour nous laisser la capacité de redéfinir nos choix et nos intentions de vie. Identifier ce qui peut évoluer dans nos comportements et nous permettre de développer l’autonomie au travail ou dans la vie privée. Et enfin atteindre le plus haut degré des synergies relationnelles.

Cycle de la dépendance - Développer son autonomie au travail - Nape Entourage

Autonomie et quête de sens

La quête de sens est de plus en plus forte dans le monde du travail et des entreprises. Comprendre ce que signifie développer son autonomie au travail devient donc indispensable. Donner corps à sa liberté individuelle au travers de l’autonomie revient à aller chercher l’équilibre entre individualisation et collectif. Atteindre cet équilibre permet non seulement de progresser dans son écoute profonde de soi-même et des autres mais également d’améliorer durablement son Impact Relationnel (IR).

L’Impact Relationnel (IR) est l’accomplissement (de bien-être et de résultats) que l’on retire des relations avec une personne et/ou un groupe.

Il convient de rappeler la signification du terme « autonomie », car il existe différentes interprétations possibles. Dans notre conscient collectif, l’autonomie est souvent assimilée à la notion de se débrouiller par soi-même. Etre autonome est souvent compris comme ne pas être dépendant d’une personne extérieure. Au sens général, l’autonomie désigne la capacité d’un individu à se gouverner soi-même en se donnant ses propres règles de conduite. Du grec autos : soi-même et nomos : loi, règle.

En philosophie morale, l’autonomie est synonyme de liberté. Elle se caractérise par la capacité à choisir de son propre chef sans se laisser dominer par certaines tendances naturelles ou collectives, ni par une autorité extérieure. Enfin au niveau médical, l’autonomie renvoie notamment à la liberté de choix du patient. Être autonome évoque en un sens, le besoin de chaque être de devenir, de faire des choix pour son propre chemin de vie. Mais aussi de jouir de son libre arbitre et d’en porter pleinement la responsabilité.

PHASE 1 : La dépendance

Ce cycle de l’autonomie ou de la dépendance est constitué de 4 phases de développement. Chaque étape est un passage et un parcours initiatique. Un deuil du connu pour aller vers l’inconnu, un processus naturel et structuré.

La phase de dépendance

Cette phase de dépendance est caractérisée par la présence d’une demande implicite ou explicite. L’individu est dépendant de l’autorité de quelqu’un ou de quelque chose. La manifestation de la dépendance ou un comportement traduisant une dépendance, selon le chercheur et psychologue américain Gregory L. JANTZ, se caractérise par les éléments en rapport à une dépendance affective :

  • Avoir du mal à prendre des décisions sans conseil ni validation d’un tiers, voire attendre que l’autre prenne des décisions à sa place. 
  • Compter sur d’autres (conjoint, famille, amis) pour assumer les responsabilités dans les domaines importants de sa vie. 
  • Craindre et éviter tout désaccord avec son interlocuteur (peur des conflits, d’être rejeté, exclu). 
  • Eprouver des difficultés à démarrer des projets ou à faire les choses par soi-même. 
  • Être anxieux ou complètement détendu quand on est seul, à la pensée de l’être. 
  • Se rendre spontanément responsable de ce qui ne va pas (dans le domaine privé ou professionnel). 
  • Se sentir dans l’obligation de satisfaire les demandes et besoins d’autrui. 
  • Avoir besoin de l’approbation et du réconfort des autres. 
  • Être incapable de poser et de défendre ses propres limites.

Dès lors, la principale préoccupation est de se faire accepter par un individu ou au sein d’un collectif. De fait, l’individu est prêt à occulter une grande partie de lui-même pour permettre de se sentir inclus. Il ne sait pas dire « non » ou a du mal à l’exprimer. L’individu existe par conséquent dans le prolongement du désir de l’autorité.


Nadia, une DAF sur-empathique

Prenons l’exemple de Nadia, Directrice Administrative et Financières dans une PME, qui vient d’être nommée à ce poste par son PDG. Son arrivée récente lui permet d’avoir un regard neuf sur les activités de la société. Pourtant, Nadia n’ose pas proposer des idées innovantes. Elle recherche d’abord l’approbation et l’aval de son PDG, à se fondre dans sa vision, quitte pour cela à ne pas mener les transformations nécessaires. Voire à abandonner ses propres méthodes de travail et in fine sa valeur ajoutée.

La dépendance est d’une certaine manière une soumission à l’autre. L’autorité prend la responsabilité de nos choix, décisions, actions. C’est également le stade où l’individu veut faire plaisir aux autres. Un comportement où l’on est ainsi amené à faire passer les besoins des autres avant nos propres besoins. Les psychologues qualifient cette façon de faire « d’assujettissement ou l’oubli de soi ». L’assujetti manifeste un intérêt excessif à satisfaire les besoins des autres au détriment des siens. Il répond aux besoins des autres ou va  dans le sens des attentes des autres en laissant ses besoins et ses satisfactions en arrière-plan. Cette attitude se traduit par une quête perpétuelle de reconnaissance et souvent une difficulté à trouver sa place ou à donner un sens à son existence.

Dans notre exemple, Nadia cède toute responsabilité à son patron. Elle perd également le sens de sa mission, et réduit de fait sa propre importance dans l’entreprise. De cette expérience avec l’oubli de soi, dans l’inertie, émerge conséquemment l’envie et le besoin d’une remise en question. C’est pourquoi Nadia a besoin d’évoluer, de croître vers la conscience de soi. L’individu quitte alors progressivement cet état de dépendance. Il est prêt à faire le deuil d’une certaine sécurité pour prendre le chemin de la connaissance du « Je » en testant l’opposition de la dépendance, c’est-à-dire la contre dépendance. L’individu commence à prendre conscience de l’importance de l’écoute de soi, de ses besoins personnels.

Sortir de la phase de dépendance - Développer son autonomie au travail - Nape Entourage


PHASE 2 : La contre-dépendance

Cette troisième phase, de contre-dépendance, est caractérisée par la remise en question de ce que l’on a appris au cours de la phase de dépendance. Nous sommes amenés à sortir de l’état de dépendance en passant par un positionnement d’opposition. C’est un processus de détachement, qui consiste à prendre notre place dans notre unité et notre singularité. L’inverse d’une posture passée qui était bien plus une  projection au travers du regard des autres qu’une réelle affirmation de soi. Les règles et directives de cette autorité sont décortiquées pour les transposer dans un regard différent. C’est l’entrée dans une lutte, une énergie guerrière pour aller chercher les forces d’expression de l’affirmation de soi. En somme, une démarche vers une nouvelle identité, une recherche d’autonomie pour trouver sa propre vérité.

Dès lors, l’individu veut exister pour lui-même. Il se coupe des désirs et des projections de l’autorité pour pouvoir ressentir ses propres désirs. Il entre alors dans une phase de recherche de l’individualité caractérisée par l’égoïsme et les émotions exacerbées. Une communication difficile s’établit alors entre les parties en relation. Elle se caractérise par du conflit, de la rébellion, de la colère, de la critique ou du jugement envers des conditionnements reçus.

C’est la phase d’apprentissage du non, où l’on teste les limites inculquées en rejetant les béquilles de l’autorité. Un juste reflet du combat intérieur pour s’ouvrir à soi-même. Un reflet du combat intérieur avec des hésitations maladroites assimilées à des premiers pas dans un espace inconnu et des doutes qui envahissent l’être. Mais un combat qui va aussi permettre l’ouverture au « moi » et à l’image de ce que l’individu ressent être sous l’égide de sa propre autorité.

Nadia se redécouvre et s'affirme

Durant cette phase, le niveau d’écoute et de compréhension de l’autre baisse drastiquement. C’est pourquoi elle reste une phase de transition qui ne permet pas de construire des relations durables immédiatement. 

Pour continuer notre exemple, Nadia entre dans une phase d’émancipation vis à vis de son PDG. Elle ose désormais proposer des transformations radicales, en prenant peu en compte les demandes de son patron. Dès lors, la communication entre eux deux devient difficile. Nadia a développé son écoute de soi, ce qui lui permet de s’affirmer, mais n’écoute plus l’autre. 

Après le passage de cette tempête intérieure et extérieure, l’individu progressivement se libère du conflit et de son ancienne peau.

PHASE 3: L'indépendance

La phase d’indépendance est la suite de l’apaisement d’un combat intérieur qui se caractérise par un état de non-dépendance. Chacun désire en effet exister en tant qu’individu dans son individualité. Voler de ses propres ailes avec ses valeurs, sa singularité, ses choix et décisions. S’approprier ses propres apprentissages et expériences dans sa propre réalité de vie. Une phase de gestation avec soi-même, l’accès à un esprit de recherche. Un processus d’involution, le deuil d’une certaine sécurité pour prendre le chemin de la reconnaissance du « JE ». Et ce, dans une masse sociétale où chacun doit trouver sa place dans l’adversité. L’individu a également le devoir de prendre soin de soi, de se protéger des autres, trouver un confort dans l’inconfort d’un climat d’insécurité. 

L’individu dans son indépendance s’enferme alors, pour un temps du moins, dans la recherche de son intérêt personnel. On assiste à la naissance d’un certain « égoïsme » tel que mis en forme par le contexte sociétal pour pouvoir survivre. De plus, l’individu adopte et se construit des masques d’apparences dans le but d’être accepté par les autres. C’est alors la naissance de plusieurs apparences en fonction de ce que les autres veulent qu’il soit. Une forme d’autonomie illusoire emprisonnée dans des dépendances à l’autre.

Une phase de frein à l'intelligence collective et aux synergies

Nadia, notre DAF, a à présent terminé de s’imposer contre l’autorité qu’elle reconnaissait à tort à son patron. Elle entre dans une phase qui peut s’apparenter à de l’autonomie mais qui en réalité n’en est pas du tout. Elle est en effet coupée des synergies que permet l’autonomie. De ce fait, ses postures rendent impossible toute collaboration transversale ou toute mise en œuvre de l’intelligence collective au sein de l’entreprise. 

Lors de cette phase, certaines personnes vivent une forme de conformisme et de « sacrifice de leur identité ». Elles ont construit des murs psychologiques qui les enferment dans des conditionnements. Ces personnes s’imposent des contraintes qui peu à peu asphyxient leur liberté de penser pour être soumises à des volontés ou courants de pensées extérieurs. L’expression du « JE » est limité par les peurs, les craintes de ce que les autres pensent par leurs jugements, par leurs critiques et leurs évaluations. L’individu s’exprime alors dans une dimension « du faire plaisir » à l’autre pour être apprécié, aimé ou accepté. Il en oublie dès lors ses propres aspirations, besoins, désirs. De ce comportement naissent des relations peu épanouissantes pour l’individu. Certes, ses niveaux interpersonnels sont améliorés, mais au détriment de ses niveaux intra-personnels. 

Parfois, il s’avère que l’individu reste dans cette étape toute sa vie si son positionnement au sein d’un groupe est sous l’influence et le conditionnement du regard de l’autre. En revanche, s’il en prend conscience, progressivement l’individu va réussir à dépasser ses peurs et ses anciennes croyances pour croître et se mouvoir vers le stade de l’inter-dépendance.

PHASE 4 : L'inter-dépendance

Cette dernière phase termine le processus d’accès à l’autonomie véritable, une phase de libération du soi, le passage du « JE » au « NOUS » dans sa pleine puissance. Autrement dit, le passage d’un état à un autre ; la métamorphose. Les masques construits en phase d’indépendance limitée se déconstruisent. C’est le temps de l’abolition à ce qui nous limite pour laisser la place à du neuf et à de l’illimité. 

L’individu s’accepte enfin tel qu’il est, dans son authenticité, sa spontanéité et sa vérité. Il se dédouane quasi totalement des regards extérieurs, il s’épanouit en dépassant la stagnation pour faire naître l’élan du cœur, un élan libérateur qui ouvre à des perspectives jusque là invisibles. 

L’individu grandit en exprimant ce qu’il est au plus profond de son être. Il entre de plus dans une nouvelle logique d’action basée sur ses émotions, ses aspirations profondes, et ses intentions de vie. C’est la phase où l’IR est à son maximum, où l’individu a trouvé l’équilibre entre écoute de soi et écoute de l’autre pour répondre aux besoins de tous. 

Pour Nadia, cela correspond à une étape où la communication est rétablie avec son patron, car chacun d’entre eux écoute l’autre. Nadia est valorisée pour ses idées, car elles sont désormais reçues positivement par son PDG. Comme ce dernier ne sent plus son autorité remise en question, leur relation est source d’enrichissement. Développer son autonomie au travail est donc un cheminement, un processus de 4 étapes connues et qui servent de repère. Elles permettent ainsi d’identifier les jeux de rôles et des masques que chacun met dans sa relation à l’autre et à l’autorité qu’il lui confère.

Phase interdépendance - Développer son autonomie au travail - Nape Entourage

Aller plus loin dans l'autonomie

Une fois que l’individu a pu s’émanciper positivement d’une relation dans le cadre de laquelle il s’empêchait d’être lui-même, une nouvelle aventure commence. Il est alors temps pour lui de devenir pleinement conscient de ses talents, de ses dons et de ses capacités pour les mettre à son service ou au service d’un collectif. Un mouvement vers l’acceptation de soi et l’acceptation de l’autre, avec ses différences et ses singularités. L’individu trouve peu à peu sa juste place axée dans un intérêt supérieur, celui du bien commun et de l’intérêt mutuel. 

Grâce à cette nouvelle étape, l’individu reprend en main son « JE » le plus complet. « JE » fais des choix en direction d’intention claire. Désormais, « JE » sais ce que je veux et « JE » sais où je veux aller. « JE » suis pour un enrichissement mutuel, et « JE » partage mes expériences. « JE » me libère de mes peurs et de mes craintes, de mes doutes : ne pas être à la hauteur, décevoir, perdre, ne pas réussir. Enfin, « JE » choisis de cheminer et j’accepte de pouvoir avoir des choses à améliorer, de grandir encore et toujours au contact des autres. 

Cette dernière phase l’amènera à réinterroger ce qu’il est et ce qu’il souhaite être. Au cours de sa vie, il sera évidemment de nouveau confronté à des relations qui le ramèneront à des phases antérieures. C’est en cheminant à travers ce parcours initiatique qu’il pourra peu à peu développer son autonomie la plus complète, quasiment stable en toutes circonstances.

Développer son autonomie au travail grâce à l'intelligence émotionnelle

Chacune des phases du cycle de la dépendance réclame de faire le deuil de son « SOI » passé. L’individu passe donc par les différentes étapes émotionnelles de la courbe du deuil ou du changement, théorisée par le Docteur et Psychologue Elisabeth KÜBLER ROSS. Pour cheminer, il lui faudra donc laisser une grande place à ses sentiments, ses ressentis et ses émotions. Accepter de désormais vivre sa fragilité et de s’ouvrir à lui-même et aux autres comme jamais auparavant. C’est ce processus émotionnel qui lui permettra peu à peu de se libérer des anciens schémas de pensées, de ses habitudes, de ses conditionnements, de ses croyances sociales et culturelles.

En développant ces capacités multiples, l’écoute de soi et l’écoute de l’autre, l’individu améliore grandement son Impact Relationnel (IR). Il construit ainsi des relations plus saines avec ses collaborateurs. 

Illustrations – storyset – freepik.fr

Article initialement co-écrit par Laetitia Villaume et Selim Saadi et publié le 1/11/2018

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